Page:Gautier - Théâtre, Charpentier, 1882.djvu/272

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Furieuses d’être ainsi trahies dans leurs cruelles espérances, les Wilis tournent autour d’Albert, et s’élancent plusieurs fois vers lui, toujours repoussées par une puissance au-dessus de la leur. La reine, alors, voulant se venger sur celle qui lui ravit sa proie, étend la main sur Giselle, dont les ailes s’ouvrent aussitôt, et qui se met à danser avec la plus gracieuse et la plus étrange ardeur, et comme emportée par un délire involontaire.

Albert, immobile, la regarde, accablé, confondu de cette scène bizarre !!! mais bientôt les grâces et les poses ravissantes de la Wili l’attirent malgré lui ; c’est ce que voulait la reine : il quitte la croix sainte qui le préserve de la mort et s’approche de Giselle, qui s’arrête alors avec épouvante, et le supplie de regagner son talisman sacré ; mais la reine, la touchant de nouveau, la force à continuer sa danse séductrice. Cette scène se renouvelle plusieurs fois, jusqu’à ce qu’enfin, cédant à la passion qui l’entraîne, Albert abandonne la croix et s’élance vers Giselle… Il saisit la branche enchantée, et veut mourir pour rejoindre la Wili, pour n’en plus être séparé !!!

Albert semble avoir des ailes, il rase le sol et voltige autour de la Wili, qui parfois essaye encore de le retenir.

Mais bientôt, entraînée par sa nouvelle nature, Giselle est forcée de se joindre à son amant. Un pas rapide, aérien, frénétique, commence entre eux. Ils semblent tous deux lutter de grâce et d’agilité : parfois ils s’arrêtent pour tomber dans les bras l’un de l’autre, puis la musique fantastique leur rend de nouvelles forces et une nouvelle ardeur !!!

Le corps entier des Wilis se mêle aux deux amants, en les encadrant dans des poses voluptueuses.

Une mortelle fatigue s’empare alors d’Albert. On voit qu’il lutte encore, mais que ses forces commencent à l’abandonner. Giselle s’approche de lui, s’arrête un instant, les yeux voilés de pleurs ; mais un signé de la reine l’oblige à s’envoler de