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Page:Gautier - Théâtre, Charpentier, 1882.djvu/297

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danse, et le jeune maître, enchanté, l’admet au nombre de ses odalisques et ordonne à l’eunuque Roucem de tout préparer pour célébrer la réception de la charmante Léïla. — La fête commence, les femmes du harem tâchent de surpasser leur jeune rivale. Quatre des plus jolies exécutent un pas en jouant des cymbales. Au pas de quatre succède un pas de trois. Léïla, qui n’a montré qu’un échantillon de son savoir-faire, reparaît couverte d’un haïc, espèce de manteau blanc qui lui enveloppe tout le corps et lui cache la figure, à l’exception des yeux. Elle s’avance au milieu du théâtre, se débarrasse de son manteau et s’apprête à danser un pas national connu au Caire sous le nom de Pas de l’abeille. — La danseuse cueille une rose : — l’insecte irrité sort en bourdonnant du calice de la fleur et poursuit l’imprudente, qui tâche de l’écraser tantôt entre ses mains, tantôt sous son pied. — L’abeille va être prise : un mouchoir dont Léïla relève le coin avec précaution rend ses ailes inutiles. Mais quoi ! elle s’est échappée, et, plus irritée que jamais, elle se glisse dans le corsage de la danseuse, qui la cherche dans les plis de sa veste, dont elle se débarrasse ; la lutte continue, l’abeille bourdonne, la jeune fille tourbillonne, augmentant toujours la vivacité de sa danse. La ceinture va bientôt rejoindre la veste, et Léïla, dans le costume le plus léger, en simple jupe de gaze, continue ses évolutions éblouissantes, et finit, éperdue, haletante, par aller chercher un abri sous la pelisse d’Achmet, qui, ravi d’admiration, s’incline amoureusement vers elle, et lui couvre, à la mode orientale, le front et la poitrine de pièces d’or. Léïla reçoit modestement les félicitations des assistants et lorsque les femmes se retirent, Achmet la fait rester auprès de lui.