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Page:Gautier - Théâtre, Charpentier, 1882.djvu/328

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Et pour s’assurer de la vérité, il promène sa main sur la taille de la jeune fille, lui tâte la jambe et lui pince le mollet avec ses gros doigts de recruteur. — Vous me chatouillez ! fait Pâquerette en s’échappant.

Ah ! vous êtes chatouilleux ? eh bien, soit ; ôtez vos habits, je ne vous toucherai pas ; mais, pour Dieu, dépéchez-vous et finissez ces façons, car je suis diantrement pressé ; aussi bien tout ceci m’a l’air un peu singulier, et vous me faites l’effet d’un drôle de pistolet.

En s’enfuyant, Paquerette a oublié d’affecter les allures viriles et s’est trahie par un mouvement tout féminin qui n’a point échappé à l’œil soupçonneux de Bridoux, frappé de certaines formes et de certaines ressemblances.

Pardieu ! je vous reconnais, vous n’êtes point un homme, mais une jeune fille, à preuve que je vous ai embrassée. Vous êtes mademoiselle Pâquerette, je m’en souviens bien. — C’était au village de ***. Tout s’explique maintenant, vous êtes amoureuse de moi et vous vouliez vous engager dans mon corps. — C’est flatteur, et en récompense de cette idée ingénieuse, il faut que je vous embrasse de rechef.

Pâquerette, atterrée, n’a pas le temps de se soustraire aux galantes entreprises de Bridoux. — Par malheur, François rentre à ce moment et voit dans les bras du sergent sa fiancée, qu’il n’a pas de peine à reconnaître, car si l’amour est aveugle, la jalousie est clairvoyante.

Comment ! vous ici, s’écrie François, sous des habits d’homme, en tête-à-tête avec Bridoux ! Est-ce là, perfide, la fidélité que vous m’aviez promise ? est-ce ainsi que vous tenez vos serments ?

La jeune fille balbutie quelques explications que François ne veut pas entendre, elle s’approche de lui suppliante, mais il la repousse avec un geste de colère.

On ne brutalise pas ainsi les femmes, dit Bridoux d’un air