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Page:Gautier - Théâtre, Charpentier, 1882.djvu/375

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de haine, sans se laisser attendrir par les supplications de Sacountalâ tombée à ses genoux.

Ces menaces répandent la consternation parmi les jeunes filles et les bramatcharis, qui connaissent la rancune et le pouvoir de Durwasas.

Canoua d’un air calme rassure sa fille et dit qu’il va faire ses efforts pour conjurer le sort. Si Durwasas est puissant pour le mal, lui est puissant pour le bien. Il s’approche du temple, récite une formule et jette sur l’autel une poignée de l’herbe cousâ. Le feu brille, et, dans la fumée qui s’élève et se sépare, se dessine un groupe représentant Douchmanta posant une couronne sur la tête de Sacountalâ. Une lueur d’un bleu céleste éclaire ce tableau. Les malédictions du méchant Durwasas seront neutralisées par les prières du pieux Canoua. Ce présage heureux rassure la jeune fille et ses compagnes.

Mais l’irascible ermite, qui a regardé cette scène d’un air méprisant, s’approche de l’autel, invoque Shivat dieu de la destruction, répand de l’herbe sacrée sur le feu et fait apparaître dans la fumée un tableau où l’on voit Sacountalâ agenouillée sur un bûcher en flamme. Une lueur rouge jette son reflet sinistre sur cette scène.

Un sentiment d’angoisse s’empare de tous les cœurs. Lequel de ces deux présages faut-il croire ? Sacountalâ d’abord laisse pendre ses deux bras avec abattement ; mais bientôt elle relève la tête. La courageuse jeune fille bravera les malédictions et les présages funestes ; elle ira malgré tout retrouver, au palais d’Hastinapourou, l’infortuné Douchmanta, qui peut avoir besoin de son dévouement. — Le sage Canoua l’approuve et la bénit.

Elle va partir, mais ses vêtements sont trop simples pour se présenter à la cour. Comment faire ? les brahmes vivent dans la pauvreté, et la sainte solitude n’a pas de bazar où l’on puisse acheter de riches habits.