Page:Gautier - Un trio de romans, Charpentier, 1888.djvu/347

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comme ne le feraient pas aujourd’hui des cuisinières.

Rosette n’en savait ni plus ni moins que les jolies femmes de son temps. Elle prit une grande feuille de papier et y traça en lettres longues d’un pouce, et de l’aspect le plus hiéroglyphique le billet suivant qu’elle aurait mieux écrit en trempant le bout de son orteil dans l’encre :

« Mon cher vicomte,

« Je suis très inquiète de vous, car sans doute vous étiez malade l’autre soir, ou troublé de remords de conscience, lorsque vous vous retirâtes si brusquement et si maussadement. Je vous soupçonne de m’avoir célé quelque gros péché quand vous étiez à mes genoux, chez cette grande désossée de Guimard. Venez achever votre confession et ne craignez rien, la pénitence sera douce. Je suis pour vous chez moi toute la nuit et tout le jour, excepté de midi à deux heures, où je répète un pas nouveau avec des gargouillades dont vous serez content, et qui me vont mieux que les rigodons, les tambourins et les loures,

« Adieu, mon cœur,
« Rosette,
« Second sujet de danse à l’Opéra. »

« P. S. — N’est-ce pas que Guimard est trop maigre et qu’elle a l’air d’un faucheux quand elle danse ? »

Cette lettre fut portée à l’hôtel de Candale, et remise au vicomte sur un joli plateau d’argent ciselé par Reveil.

Candale ne s’étonna pas autrement des jambages hasardés et de l’orthographe fantastique du poulet qu’il déchiffra assez couramment, et dit au grand