Page:Gautier - Une larme du diable.djvu/69

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cinname, manne distillée, fleur des prairies, noisette des bois ! ô vert-pomme et bleu de ciel ! On ne peut pas dire deux mots de galanterie à ces diables de femmes qu’elles ne vous condamnent aux galères d’amour à perpétuité. Tu voudrais être moi, pauvre enfant ! Tu ne me ressembles guère en cela, et il y a longtemps qu’il m’ennuie d’être moi. Vois-tu, on est à soi-même un terrible fâcheux, un visiteur bien indiscret et un importun d’autant plus insupportable qu’il n’y a pas moyen de le mettre à la porte. Toutes les âmes n’ont pas un aussi joli logement que la tienne, et beaucoup souhaitent par ennui ce que tu souhaites par amour.

ALIX.

Je me donnerai à toi pour l’éternité.

SATANAS, à part.

Heuh ! heuh ! tu rencontres plus juste que tu ne penses. Pour l’éternité ! Il ne s’agit pas ici de l’éternité des amoureux, dont il en peut tenir vingt-quatre à l’année, mais d’une belle et bonne éternité du bon Dieu, sans commencement ni fin, une vieille couleuvre qui se mord allégoriquement la