Page:Gautier - Zigzags.djvu/247

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 250 —

pas existé ; c’est de l’imagination de sir Thomas Lawrence, esq., que la femme anglaise est sortie.

L’être a toujours la forme de son idée. — En Chine, par exemple, le suprême du beau pour les femmes, c’est la gracilité et la sveltesse poussées à l’extrême. Pour les hommes, au contraire, trois mentons et un abdomen majestueux sont indispensables à l’élégance. Toutes les femmes sont minces comme des joncs, tous les hommes ventrus comme des poussahs. En France, sous l’Empire, les versificateurs du temps avaient mis à la mode les teints de lis et de roses ; les lis et les roses fleurirent sur tous les visages. Le romantisme vint, Alfred de Musset fit le célèbre vers :

Elle est jaune comme une orange.


Il n’y eut plus que des femmes vertes. La conquête d’Alger et les Orientales de Victor Hugo ont produit une quantité prodigieuse de têtes turques, arabes, albanaises, qui n’existaient pas auparavant. La pensée est un marteau in-