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lointain. Cependant Mélas put entendre : « Mon âme à Satan, pourvu que j’aie du rhum. »

Je puis compter sur lui, dit Mélas qui regagna le chemin du roi pour entrer chez lui.

Le lendemain, la journée était belle. Il y avait bien quelques nuages épars çà et là, légères nacelles au sein de l’azur des cieux ; mais le vent chaud devait bientôt les nouer à l’horizon où la mer semblait se confondre avec le ciel. La mer avait tu peu à peu sa grande et forte voix ; on n’entendait plus que le brisement de ses flots sur la grève.

Comme la journée fut longue et pleine d’anxiété pour Mélas, ce Caïn qui voulait trahir son ami comme Judas, son maître, par un baiser. Rien ne le touche, ni le spectacle de sa pauvre mère en larmes, ni la vie de la victime désignée d’avance au couteau du meurtrier. Enfin ! l’heure est sonnée. Les coups de l’horloge ont eu un dur retentissement dans le cœur ingrat de Mélas.

George est invité à faire une promenade au bois, vers l’heure du soleil couchant. Alexandrine lui avait demandé sa veillée. Non, mon ange, lui avait-il dit, je dois des ménagements à mon ami Mélas ; et pour adoucir la rigueur de son sort, je dois lui sacrifier quelques instants du bonheur que je goûte auprès de toi.

Oh ! George, nous avons été si longtemps sans nous voir, que nous avons besoin de tous nos instants. C’est un besoin pour moi de te voir, de te sen-