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pression du sauvage. Il n’était pas fermé. Pas un moindre bruit. Tout est mort. Pourtant un léger souffle leur indique la présence de personnes de l’autre côté de la cloison simple. En effet, c’est là que le Visage pâle leur a dit qu’ils trouveraient l’enfant.

La Chouette arrive jusqu’à la porte de la chambre. Elle est entr’ouverte. Il prête l’oreille. Au même instant, un coup de tonnerre vint le faire frémir, et un éclair lui permit de distinguer l’endroit où repose l’enfant. Il ne voyait pas la lampe sourde qui brûlait au fond, sur une table près de la tête du lit.

Le Crochu, dit la Chouette, ouvre le grand trou, là bas, et profite pour cela d’un coup de tonnerre.

Il avance. Le voilà près du berceau. Le cœur du monstre semble s’adoucir. Son œil n’a plus la même expression : il fixe tantôt l’enfant, tantôt la mère.

Pauvre mère ! la tête ensevelie dans sa chevelure épaisse, le bras nu recourbé au dessus de sa tête, elle sourit. Songes dorés qui la bercez à cette heure d’enchantement et d’ivresse, captivez la à jamais ; gardez la sous votre empire, car son réveil sera trop triste. Elle sourit ! sourire divin sur des lèvres d’ange. Oui, c’est bien l’ange gardien de l’humble enfant qui repose près d’elle. Que voit-elle en songe ? Son George, son mari folâtrant dans les prés ensoleillés avec son enfant qui la caresse et son époux qui lui sourit. Elle ne rêve pas aux douleurs qui affligent et qui abattent, car sa lèvre serait pendante, son front aurait une ride : nuage sur le ciel.

Soudain l’enfant jette un cri : la Chouette venait de le saisir. La mère, en une seconde, est sur son séant, et d’une main fiévreuse elle a levé la lampe