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le seuil de ma cabane, sinon tu te repentiras des effets de ma colère. Il m’a bravé jusqu’ici, il est capable de tout. J’aurai à me défier de lui comme d’un renard, car il en a la finesse et la ruse. Je redoute plus que toi, car pour toi je serai presque toujours ici pour te surveiller et faire en sorte que l’eau de feu ne te délie pas la langue. — Puis Mélas, rompu, brisé par tant d’émotions ressenties depuis plusieurs jours, se jeta sur son lit de sapin où le sommeil ne tarda pas à venir le visiter.

Le lendemain, le Chef vint visiter Mélas et voir son enfant trouvée. Il avait appris déjà que son ami était arrivé au village avec une visage-pâle.

— Il est beau, l’enfant.

— Oui, Chef ; elle sera ton sujet. Le Chef paru flatté.

— Quel nom ? dit-il.

— Pas de nom, Chef.

— Oh ! alors il faut lui en donner un.

— À toi cet honneur, Chef.

— Eh ! bien, tu ignores sa venue, appelle la Fleur du mystère. Tu l’as trouvée aux grandes huttes blanches, à l’autre côté de la mer ?

— Oui, Chef.

— Eh ! bien, aime-la et fais en un bon sujet de ma tribu.

— On ne saurait lui trouver un plus beau nom que celui que tu viens de lui donner, Chef. L’esprit de vie a parlé par ta bouche, ou bien, les mânes des anciens chefs ont soufflé sur toi.

Mélas connaissait le côté faible du sauvage, et c’était par la louange et la cajolerie qu’il s’était faufilé pour ainsi dire dans l’amitié du Chef qui l’avait en grande estime. C’était un vénérable vieillard voûté, aux cheveux noirs encore malgré ses 70 années. Sa