Page:Gauvreau - Captive et bourreau, paru dans La Gazette des Campagnes, 1883.pdf/194

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

son père, qu’il l’a trompée, et que ses père et mère vivent là-bas, aux grandes huttes du Sud, et demande-lui de profiter de l’occasion pour fuir vers ces rives. Elle ne saurait refuser, car elle t’aime et redoute le Hibou, qu’elle n’aime pas. Fuyez, et je pourrai me dire « J’ai aimé Fleur-du-mystère pour souffrir et pour me dévouer. »

Sublimes paroles dans la bouche d’un enfant des bois ! Oh ! mes chers sauvages, il y a en vous plus de sincérité et de cœur dans toutes vos actions, qu’il y en a dans les agissements de certaines gens policées. J’aime votre franchise comme je déteste ces sourdes menées de gens connus qui ont juste assez d’esprit pour ne pas être de grosses bêtes… raisonnables.

Il n’en fallait pas davantage pour convaincre Laurent. Cependant il hésitait encore.

Le jour va venir, dit Bison-des-Plaines, et avant que l’aube blanchisse l’horizon, il faut que vous soyez hors de vue. Te faut-il du courage ? frère. Oh ! si je pouvais m’en arracher un peu du cœur, je te le passerais, et déjà tu volerais vers le wigwam de Fleur-du-mystère. Pars ! Je tiens, moi pauvre enfant de la forêt, au bonheur de celle que tu aimes et dont je ne suis pas jaloux, parce que tu sauras la rendre plus heureuse que moi, toi qui as un visage pâle comme elle.

— C’est Dieu qui t’envoie, s’écrie soudain Laurent. Je cours.

— Merci, frère.

— J’arrangerai tout ici, et vous me trouverez au bord des flots.