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secours du Chef, et surtout de son fils qui l’empoigna au moment où la force du courant allait la broyer sur les roches qui terminent le petit rocher. On la ramena sous la tente du Chef. On sécha ses vêtements après l’avoir rendue à la sensibilité, et rendue chez elle, elle ne parla à personne de cet accident qui marqua le jour de cet entraînement vers le fils du Chef qui ne se montra pas indifférent à la jeune fille et qui l’aima d’un amour aussi sauvage que jaloux.

Ils s’aimaient donc follement. Aussi, quand le père témoigna son désir de ne plus la voir retourner au village Maléchite, la jeune fille, forte, dévora son chagrin en silence. Pendant huit jours, ce ne fut que larmes secrètes, sanglots comprimés, faux airs de joie menteuse. La petite chambre, bien souvent, fut le muet témoin des scènes d’une douleur vraie et profonde. Ce que c’est que le cœur humain !

Un jour de juin, par une belle après midi de douce chaleur, la jeune fille descendit sur la grève pour y respirer l’air pur, entendre le cri de l’alouette encore rare à cette saison. Elle descendit tranquillement le chemin qui longe la rivière.

De l’autre côté de la rivière, sur une petite éminence, les Maléchites, leur chef en tête, ont bâti leurs cabanes d’écorce. Au même moment, un léger canot se détachant du bord, glissait mollement sur la surface tranquille de la rivière. Un sauvage seul le conduit. Il semble ne pas apercevoir la jeune fille qui a senti battre son cœur en reconnaissant celui qu’elle aime, le fils du Chef sauvage. Elle agite son