Page:Gavarni - Grandville - Le Diable à Paris, tome 2.djvu/38

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tion, comme il faut toujours en revenir à nous en fait d’amour. Ils coûtent cher à attirer, et nous coûtons cher à retenir.

« Comme ils sont amusants ! comme ils sont simples ! comme ils ont de l’esprit, du goût, sans effort, sans tomber dans le fossé de la bouffonnerie, sans rouler dans celui du prétentieux !

« As-tu porté quelque chose à la caisse d’épargne le mois dernier ? Voyons, ne me mens pas. Tu n’as rien porté. C’est mal. Je vais mettre opposition entre les mains de ton marquis pour deux cents francs, afin que le mois prochain je n’aie pas le même reproche à t’adresser. Vois-tu, bonne, moi je mettrais le maire de mon arrondissement à la caisse d’épargne. Tu sais que les fonds ont monté avant-hier. Je gagne six mille francs, six amours de mille francs que je placerai sur la tête de celui dont je n’ai peut-être pas encore fait la tête. Place, ma chère, place ; nous grossissons : et grossir c’est vieillir, a dit le spirituel Bequet.

« Connais-tu les derniers vers de Théophile Gautier sur l’oreille de Forster ? Procure-toi-les ; ils sont divins. Quel charmant poëte !… Que ne peut-on vivre pendant trois mois en concubinage avec l’esprit des gens qu’on aime ! Quelle Aspasie je ferais !

« Adieu, le tiers de mon âme ! je ne puis plus dire la moitié. Un tiers est à celui qui est en Italie, un second tiers est à celui ou à celle que j’ai sous la main, l’autre tiers est à toi. Rien pour moi, puisque je vis par vous trois.

« Ta Bérénice. »