Page:Gazier - Histoire générale du mouvement janséniste, depuis ses origines jusqu’à nos jours, tome 2.djvu/128

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Voilà certes un complot bien ourdi et une affaires menée rondement ; le général des Jésuites, le fameux Ricci, exultait, et il pouvait se croire supérieur au Père Tellier lui-même. Le Bref foudroyant ne tarderait pas à être transformé en Bulle, et les affaires de la Compagnie de Jésus allaient prendre une face nouvelle. Mais les temps étaient changés, et les choses ne se passèrent pas en 1761 comme elles s’étaient passées en 1713. Les cours de France, d’Espagne, de Naples et de Vienne ainsi que la république de Venise refusèrent catégoriquement de recevoir le Bref du 14 juin, et Louis XV s’en expliqua par l’intermédiaire de Choiseul avec une énergie extrême. Le jurisconsulte Adrien Le Paige avait dressé pour le roi un vigoureux mémoire dont j’ai sous les yeux la minute autographe. Il proposait d’attaquer résolument le Bref de Clément XIII, qu’il jugeait avec la plus grande sévérité ; il demandait que l’on défendît au nonce de le laisser transpirer, et qu’on le rendît personnellement responsable s’il en était distribué en France un seul exemplaire. Le roi lut ce beau mémoire, qui est encore inédit comme tant d’autres, il en adopta sans hésiter les conclusions, et le nonce obéit si ponctuellement que Le Paige lui-même, le collectionneur incomparable, ne put se procurer un exemplaire imprimé du Bref Dum inter gravissima ; il en fut réduit à insérer dans ses recueils deux copies manuscrites[1]. Choiseul écrivit au pape en le tançant d’importance et en lui déclarant qu’il ne lui permettrait pas de mettre la

  1. Mésenguy en a donné une analyse dans le mémoire justificatif publié en 1763, p. 15. Les Nouvelles Ecclésiastiques de même.