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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/114

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j’avois passé sept ans et demi, c’est-à-dire plus de la moitié de ma vie !

Au bout de quinze jours, nous allâmes à Passy chez M. de la Popelinière, fermier général, où nous passâmes tout l’été. M. de la Popelinière étoit un vieillard de soixante et six ans, d’une santé robuste, d’une figure douce, agréable et spirituelle ; il n’avoit pas l’air d’avoir plus de cinquante ans. On a pu donner quelques ridicules à cet homme, célèbre par son faste et sa bienfaisance, il eût été impossible de lui trouver un tort ou un vice. Il avoit beaucoup d’esprit, un caractère facile et doux, et une très-belle âme ; il faisoit avec agrément des vers, des chansons, des comédies et des romans. Il protégeoit avec discernement les artistes et les auteurs sans fortune. Mariant et dotant tous les ans six pauvres filles, il faisoit en outre un bien infini à Passy, faisant travailler les ouvriers, répandant d’abondantes aumônes dans les familles indigentes. Il avoit les mœurs les plus pures, la conduite la plus décente et la plus régulière ; il tenoit un grand état de maison sans avoir jamais fait aucune dette ; il recevoit beaucoup de monde et très-bonne compagnie ; il faisoit les honneurs de sa