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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/124

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que ces vers n’alloient point au sujet, fit ceux-ci :


Pour ces fleurs il n’est qu’un printemps ;
Du moins la vie a son automne.
Prenons ce que le sort nous donne,
Et connoissons le prix du temps.


Ces vers me parurent alors si charmans, ils se gravèrent tellement dans ma tête, que plus d’un demi-siècle écoulé depuis n’a pu les effacer de ma mémoire. Comme j’avois grande envie de plaire à M. de la Popelinière, j’aurois bien voulu que ma mère lui eût dit les vers que j’avois faits sur mon nom et ceux de mademoiselle de Mars et de Victoire. M. de Mondorge en avoit paru si surpris, que je me flattois que M. de la Popelinière en seroit content ; mais ma mère n’en parla jamais, et je n’osois pas lui confier ma secrète vanité d’auteur, car je la craignois tant, qu’il m’étoit impossible de lui parler à cœur ouvert. Il y a quelque chose d’extrême dans mon caractère, et une grande mesure dans mes opinions ; ce qui a fait que j’ai bien raisonné, que j’ai eu du goût, et que néanmoins j’ai fait beaucoup d’étourderies et de fausses démarches. Ou j’ai une confiance sans bornes, ou je n’en ai point du tout. Mon