Aller au contenu

Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/185

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parloir ; il avoit plus de soixante ans, il étoit expansif et rempli de bonté ; il me témoignoit la plus grande amitié ; j’en étois d’autant plus touchée que j’attribuois ces marques d’affection au souvenir qu’il conservoit de mon père ; mais enfin il me fit connoître ses véritables sentimens par la plus singulière déclaration d’amour qu’on ait jamais faite il m’envoya par son valet de chambre un gros paquet contenant sa généalogie toute entière, en me faisant prier de l’examiner avec attention ; mais toute mon application à cet égard ne me rendit nullement favorable à ses vœux. Il vint le jour même demander solennellement mon cœur et ma main ; il fut très-surpris que ses superbes parchemins eussent produit si peu d’effet sur mon esprit. Ma mère m’ordonna cependant de réfléchir à sa proposition, en me représentant qu’il étoit riche et qu’il avoit une grande naissance ; je persistai avec beaucoup de fermeté dans mes refus, et il n’en fut plus question. Il ne discontinua point ses visites, mais il fut beaucoup plus froid avec moi ; il ne s’occupa plus que de ma mère, et il s’en occupa si bien, que dix-huit mois après il l’épousa ; j’aimois infiniment mieux l’avoir