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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/222

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peintre s’appeloit M. Tirmane, c’étoit un homme de cinquante ans, dont l’originalité et la crédulité ont fait mes délices pendant six mois. M. Tirmane avoit autant d’orgueil que de simplicité ; il peignoit fort bien les lambris d’une chambre, et une décoration d’appartement, et il étoit persuadé qu’il avoit le talent de Raphaël et de Rubens ; il nous en fit voir un échantillon dans la toile de notre théâtre ; il eut la prétention d’en faire un tableau, qui représentoit la plus ridicule figure de femme jouant de la harpe à rebours, c’est-à-dire, ayant la harpe posée sur l’épaule gauche. M. de Genlis, en voyant ce chef-d’œuvre, s’écria que c’étoit mon portrait, et qu’il était frappant ! M. Tirmane convint qu’il avoit eu en effet le projet de faire mon portrait d’idée, et, charmé de ce premier succès, il me demanda la permission de me peindre régulièrement, mais en cheveux épars, parce qu’il étoit très-frappé de la longueur de mes cheveux et de leur couleur châtaigne. Je promis de lui donner une séance le lendemain, et m’y préparai de mon mieux ; je mis un pied de rouge très-foncé, je fis partager mes cheveux en plusieurs mèches lisses, sans poudre, j’en entortillai autour de mon