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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/327

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Madame la comtesse de Bouflers et la maréchale de Luxembourg#1, toutes deux célèbres par leur esprit et par le bon goût de leur ton et de leurs manières, amies intimes de M. le prince de Conti, passoient à l’Île-Adam toute la belle saison, et là, ainsi qu’à Paris, elles étoient les juges suprêmes de tout ce qui débutoit dans le monde. Je n’avois point été chez elles, je n’avois fait que les rencontrer, et je n’en étois connue que de vue. Jusque-là j’avois gardé dans le monde un profond silence ; je ne parlois que dans l’intimité ; on ne louoit en moi que ma harpe et ma figure ma ré-[1]

  1. La maréchale de Luxembourg étoit alors veuve, pour la seconde fois. Elle avoit épousé en premières noces le duc de Bouflers, mort à Gênes, de la petite vérole, en 1747. De l’esprit, un goût sûr, une longue expérience de la cour et du monde en avoient fait l’arbitre de la politesse et du bon ton. Madame de Luxembourg aima les arts, les talens et l’esprit ; elle protégea Rousseau. Madame de Genlis parle avec assez de détails de leur rupture ; elle voyoit aussi très-souvent La Harpe qui la conduisoit dans les rues et dans ses promenades à pied, ordonnées par le docteur Tronchin. On dit qu’une de ses amies lui demandant un jour pourquoi elle faisoit de La Harpe son chevalier, madame de Luxembourg lui répondit : « Que voulez-vous, ma chère ? il donne si bien le