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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/344

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conservé long-temps ; mais ses mœurs ont toujours été pures. Les femmes ne l’aimoient pas elles envioient le charme séduisant de sa figure, elles ne rendoient nulle justice à sa bonté, à sa douceur ; et comme on pouvoit la critiquer en mille choses, on ne l’épargnoit pas dans ce qu’on pouvoit blâmer. Je n’ai jamais entendu faire autant de petites moqueries qu’on en faisoit sur elle, ce qui ne m’empêchoit ni de la rechercher, ni de l’accueillir, ni de la trouver charmante. La dernière fois que ma tante et moi nous soupâmes chez elle, avant d’aller à l’Île-Adam, M. de Lusignan, qu’on appeloit la grosse tête, étoit à ce souper. M. de Lusignan n’étoit pas dépourvu d’esprit, mais il manquoit absolument de réflexion, et il avoit pris l’habitude de dire naïvement tout ce qui se présentoit à son imagination. Comme il n’avoit point de méchanceté, on lui passoit ce caractère qui lui donnoit une sorte d’originalité. Au souper, dont je parle, étant à table dans la salle à manger, ses yeux se portèrent sur un grand tableau placé vis-à-vis de lui, et qui représentoit une très-belle femme assise et paroissant réver tristement. Il questionna M. d’Egmont sur cette belle personne ; M. d’Eg-