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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/345

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mont répondit que cette figure mélancolique étoit une de ses aïeules, femme d’un comte d’Egmont, qui, ayant acquis les preuves de son infidélité, lui coupa la tête. « Eh ! mon Dieu ! madame, s’écria M. de Lusignan, en s’adressant à madame d’Egmont ; ce tableau-là ne vous fait-il pas peur ?… Mais, poursuivit-il, grâce au ciel, les d’Egmont n’ont plus cette férocité. » Pendant ces belles remarques, tout le monde se regardoit, madame d’Egmont rit d’une manière un peu forcée, on se hâta de changer d’entretien. Ma tante conta cette scène à plusieurs personnes, et enfin on en parla à madame d’Egmont, en lui disant que c’étoit moi qui l’avois contée. Lorsque madame d’Egmont vint à l’Île-Adam, je fus très-étonnée de la trouver d’une extrême sécheresse avec moi ; j’appris qu’elle disoit que, malgré mon air doux et timide, j’étois fort malicieuse ; je priai ma tante de lui demander pourquoi elle me jugeoit ainsi, après m’avoir montré tant de bienveillance. Ma tante alla chez elle un matin, et madame d’Egmont lui dit ce qu’on lui avoit rapporté ; alors, ma tante fit une chose parfaitement honnête, elle me justifia en s’accusant. Je n’ai pu douter de ce bon