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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/383

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sonnes, il les haïssoit. Il fut désobligeant pour moi, et je m’en vengeai d’une manière qui charma madame d’Egmont la jeune. J’affectai pour lui le profond respect qu’on auroit pour un centenaire ; il en fut outré, et son dépit produisit les scènes les plus comiques. Enfin, il demanda à madame d’Egmont quel âge je lui croyois ; elle répondit qu’elle s’amusoit de ma simplicité, et qu’elle me laissoit croire qu’il avoit quatre-vingt-dix-huit ans. Cette opinion ne le raccommoda pas avec moi ; il déclara que j’étois plus que simple, et il fit entendre qu’il n’avoit jamais rencontré dans le monde une jeune personne aussi bornée. Sur la fin de ce voyage, je vis à Braine un vrai vieillard, mais très-aimable, le maréchal de Richelieu, père de madame d’Egmont la jeune. Je le regardois avec une extrême curiosité, en songeant qu’il avoit vu Louis XIV, et qu’il avoit vécu dans l’intimité de madame de Maintenon. Le maréchal étoit gracieux, rempli de douceur et de bonté, il avoit eu à la guerre des succès qui honorent la vieillesse, et il n’étoit pas humilié de n’en plus avoir d’un genre frivole. Ce fut là que je lui entendis conter qu’il avoit en vain dit à Voltaire, que le Testament du car-