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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/64

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tout-à-fait cinq pieds d’élévation : au bas de cette fenêtre étoit une grande terrasse sablée, avec un mur à hauteur d’appui de ce côté, très-élevé extérieurement, et s’étendant le long d’un étang qui n’étoit séparé du mur que par un petit sentier couvert de joncs et d’herbages.

Des petits garçons du village venoient là pour jouer et couper des joncs ; je m’amusois à les regarder, et bientôt j’imaginai de leur donner des leçons, c’est-à-dire de leur enseigner ce que je savois : le catéchisme, quelques vers des tragédies de mademoiselle Barbier, et ce qu’on m’avoit appris par cœur des principes de musique. Appuyée sur le mur de la terrasse, je leur donnois ces belles leçons le plus gravement du monde. J’avois beaucoup de peine à leur faire dire des vers à cause du patois bourguignon, mais j’étois patiente, et ils étoient dociles. Mes petits disciples, rangés au bas du mur au milieu des roseaux et des joncs, le nez en l’air pour me regarder, m’écoutoient avec la plus grande attention, car je leur promettois des récompenses, et je leur jetois en effet des fruits, des petites galettes et toutes sortes de bagatelles. Je me rendois presque tous les jours