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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/87

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touchant d’amour paternel[1]. Tout l’hiver se passa, pour nous, à jouer la tragédie, la comédie, et sur un assez joli petit théâtre que ma mère fit faire. Je jouai Zaïre, Iphigénie ;

  1. Voici comment cette anecdote est racontée par l’auteur : « La comtesse de Sercey, ma tante, conduisit aux eaux de Bourbon-Lancy son mari, tombé en apoplexie et paralytique de la moitié du corps. Il étoit depuis deux mois aux eaux, et toujours dans le même état dans son lit, privé de la parole, ne donnant aucun signe de connoissance, ne pouvant faire le moindre mouvement de son bras droit, ni même soulever la main de ce côté, lorsque ma tante reçut une lettre de M. de Chessac, commandant de la marine (nous étions alors en guerre avec l’Angleterre), qui lui faisoit le détail d’une action très-brillante du jeune Lucain de Sercey, âgé de seize ans, qui servoit dans la marine. Dans un combat, il s’élança le premier à l’abordage, et, malgré plusieurs blessures, il fit des prodiges de valeur ; le vaisseau ennemi fut pris, et le combat fini on questionna le jeune Sercey pour le panser, parce qu’il étoit couvert de sang. Je crois, dit-il, que c’est le sang des Anglois, car je n’ai rien senti. C’étoit bien le sien ; il avoit trois blessures, mais qui n’étoient pas dangereuses. Sa mère reçut, avec la lettre de M. de Chessac, un billet écrit de la main de son fils. » Madame de Sercey, pensant qu’il n’étoit pas impossible que son mari eût conservé une sorte de connois-