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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T1.djvu/92

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mademoiselle de Mars me quitte, je cours m’enfermer dans mon cabinet, j’ouvre le billet, et j’y trouve une déclaration d’amour très-positive. Mon premier mouvement fut d’être excessivement choquée que le fils d’un médecin, qu’un homme qui n’étoit point gentilhomme osât me parler d’amour ! J’allai sur-le-champ montrer ce billet à mademoiselle de Mars, qui me dit que je devois le porter à ma mère, ce que je fis. Le jeune homme fut réprimandé par son père, comme il méritoit de l’être ; il conçut tant de chagrin de cette aventure, qu’il s’engagea et disparut. Quinze ans après, son père, ayant fait un voyage à Paris, vint me voir au Palais-Royal ; je lui demandai des nouvelles de son fils, ce qui le fit sourire ; et il me répondit qu’il l’avoit pleuré pendant trois ans le croyant mort, qu’au bout de ce temps il étoit revenu, qu’on avoit obtenu son congé, qu’il avoit fait un excellent mariage, qu’il étoit heureux et un très-bon sujet.

J’ai oublié de parler d’un de nos voisins, nommé le baron de Bussœuil, pour lequel j’avois une grande vénération : c’étoit un vieux garçon de quatre-vingts ans, parent de mon père, qui l’appeloit son oncle. Il avoit un joli