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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T2.djvu/133

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beaucoup ce jour-là, parce que c’étoit justement celui de la présentation de madame du Barri. Nous la rencontrâmes partout, elle étoit mise magnifiquement et de bon goût. Au jour sa figure étoit passée, et des taches de rousseur gâtoient son teint. Son maintien étoit d’une effronterie révoltante, ses traits n’étoient pas beaux, mais elle avoit des cheveux blonds d’une couleur charmante, de jolies dents, et une physionomie agréable. Elle avoit beaucoup d’éclat à la lumière. Le soir au jeu nous arrivâmes quelques minutes avant elle. Quand elle entra toutes les femmes, qui étoient contre la porte, se jetèrent les unes contre les autres du côté opposé, pour ne pas se trouver assises près d’elle ; de sorte qu’il y eut, entre elle et la dernière femme du cercle, l’intervalle de quatre ou cinq plians vides. Elle vit avec le plus grand sang-froid ce mouvement si marqué et si singulier, rien n’altéra son imperturbable effronterie. Lorsqu’à la fin du jeu le roi parut, elle le regarda en souriant ; le roi sur-le-champ la chercha des yeux : il paroissoit avoir de l’humeur, et ne resta qu’un moment. L’indignation à Versailles étoit portée au comble ; en effet, on n’avoit jamais