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absurdités ? Votre Esculape est mort, et celui qui viola à Thespies cinquante vierges dans une seule nuit a perdu la vie au milieu des flammes où il s’était précipité lui-même. Prométhée, cloué sur le Caucase, subit la peine de ses bienfaits envers les hommes. Votre Jupiter est un envieux, qui trompe les mortels par des songes pour les faire périr. C’est pourquoi, à la vue de ces monuments de votre crédulité, supportez la nôtre si elle est semblable ; mais si nous n’avançons rien d’absurde, vos récits sont donc des folies ? Si vous rappelez la génération de vos dieux, vous avouez par là qu’ils sont mortels. Pourquoi, en effet, Junon n’enfante-t-elle plus ? Serait-elle trop vieille, ou bien n’a-t-elle plus de messager pour nous l’apprendre ? Croyez-moi, ô Grecs ! ne cherchez point à expliquer par des allégories ni vos dieux, ni vos fables ; car ce serait détruire par là même vos divinités. En effet, si vos dieux sont tels que vous le prétendez, ils sont vicieux et sans mœurs ; et si c’est la nature qu’il faut adorer en eux, ils ne sont plus ce que vous dites. Quant à moi, je n’adorerai point des éléments, et je n’engagerai personne à le faire. Métrodore de Lampsaque, dans un livre sur Homère, a eu l’imprudence de ramener tous vos dieux à la physiologie ; car il dit que Junon, Minerve et Apollon ne sont point ce que pensent ceux qui leur élèvent des temples et des autels, mais qu’ils sont des parties de la nature et des éléments. Vous ne pouvez nier sans doute qu’on doit rapporter à la même nature Hector, Achille, Agamemnon, tous les Grecs et tous les barbares qui combattirent pour Hélène et Pâris, et que tous ces héros n’ont été inventés que par l’imagination des poëtes, puisqu’aucun d’eux n’a jamais existé ? Et ce n’est pas sans raison que je suis entré dans tous ces détails ; car j’ai voulu montrer combien il serait injuste de comparer la doctrine qui nous apprend à connaître Dieu, avec les opinions de ceux qui se plongent dans la matière et dans la fange.

XXII. Quelle est en effet votre doctrine ? Comment ne pas rire de ces jeux solennels que vous célébrez aux frais du public en l’honneur de vos dieux infâmes, et qui jettent les hommes dans tous les désordres les plus honteux ? J’ai vu souvent des hommes que j’admirais, et que j’ai méprisés ensuite, parce qu’ils n’étaient pas au fond ce qu’ils paraissaient au dehors. Ils étalaient un luxe sans bornes et ils étaient perdus de débauches : on voyait briller leurs yeux ; leurs mains s’agitaient en tous sens, et la fureur animait leur visage, couvert de boue ; tantôt ils étaient semblables à Vénus, tantôt à Apollon ; accusateurs de tous les dieux, ils étaient un assemblage de toutes les superstitions ; ils blâmaient les actions héroïques, se jouaient