Aller au contenu

Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 2.djvu/273

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des meurtres, et enseignaient l’adultère et l’avarice ; ils prêchaient l’impudicité et faisaient prononcer d’injustes arrêts de mort ; cependant, malgré tous leur crimes, ces hommes étaient loués de tout le monde. Pour moi, j’ai repoussé avec horreur leurs mensonges, leur impiété, leurs infâmes passions, toute leur personne, enfin ; voilà cependant les hommes qui vous séduisent, et vous accablez d’outrages ceux qui ne partagent point vos sentiments. Je ne veux point rester en admiration quand tous ces hommes chantent à la fois ; je ne veux point ressentir les passions de celui qui me provoque du regard et par des gestes contre nature. Que se fait-il de bon ou de louable parmi vous ? On déclame avec bruit des turpitudes ; on se livre à des danses indécentes ; et tandis que des acteurs enseignent l’adultère sur la scène, ils ont pour spectateurs vos fils et vos filles : voilà certes de belles assemblées, que ces réunions où se dévoilent toutes les infamies de la nuit, où se déclament les discours les plus obscènes ! Sans doute ils sont bien dignes d’éloges, ces poëtes menteurs qui imposent par leurs gestes à leurs crédules auditeurs !

XXIII. J’ai vu des hommes, fatigués de la peine qu’ils se donnaient pour exercer leurs corps, appesantis par le poids d’un embonpoint qu’ils portent partout, que l’on couronne par la main de juges qui les provoquent non point à faire une bonne action, mais à se disputer et à se battre, et l’on récompense celui qui a commis le plus de meurtres ! Ce sont encore là les moindres excès. Il en est de plus révoltants qu’on rougirait de raconter. Il est des hommes qui vivent dans la mollesse et se vendent pour la débauche, au risque d’en mourir. Le pauvre se vend, le riche achète des assassins ; des juges siègent pour prononcer entre des gladiateurs qui se déchirent les uns les autres sans aucun motif, et il n’est personne qui descende dans l’arène pour les secourir. Ne sont-ce pas là en effet de belles actions ? Celui d’entre vous qui est au-dessus des autres rassemble une armée d’assassins et se fait gloire de nourrir des scélérats. Aussitôt qu’ils sortent de chez lui, vous accourez tous en foule aux spectacles pour être juges vous-mêmes de la barbarie des juges et des gladiateurs ; celui qui n’a pu assister au carnage s’afflige de n’avoir pas été condamné à voir de ses propres yeux ces crimes atroces, impies, exécrables. Vous tuez des animaux pour manger leur chair, et vous achetez des hommes pour servir à l’âme un festin de chair humaine et la repaître de flots de sang, par une horrible impiété. Le voleur tue pour enlever les dépouilles de sa victime, et le riche achète les gladiateurs pour les faire égorger.