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intelligence, tout raison, tout esprit agissant, tout lumière, existant toujours le même et toujours semblable à lui ; notions qu’il est bon et utile que nous ayons de lui, et que les Écritures nous donnent : il suit de là que ce qui se dit des passions de l’homme et des modes de son intelligence ne saurait s’appliquer à Dieu. Notre langue, qui est de chair, ne peut suivre ni exprimer les opérations de notre intelligence, qui est esprit : il en résulte que notre Verbe est étouffé au dedans de nous-mêmes, et ne peut se produire au dehors tel qu’il est conçu, mais seulement morcelé, et par parties, suivant les forces de la langue.

Dieu existant à la fois tout esprit et tout verbe, ce qu’il pense il le parle, et ce qu’il parle, il le pense : car en lui la pensée est le verbe, l’esprit est verbe, et l’intelligence qui renferme tout : tel est le Père. Celui donc qui parle de l’esprit de Dieu, et qui applique à cet esprit divin les modes de son propre esprit, fait de Dieu un être composé, comme si Dieu et l’intelligence universelle étaient deux choses différentes et distinctes. Il n’est pas moins absurde de placer l’intelligence divine au troisième degré, à partir de Logos (c’est ne pas apprécier sa grandeur), et de séparer ainsi Dieu de sa propre intelligence. C’est de lui dont le prophète dit : Qui racontera sa génération ? Quant à vous, vous prétendez expliquer cette génération du Verbe, en le faisant descendre du Père, et appliquant ce que vous savez du verbe de l’homme, qui se produit au dehors par la langue, au Verbe divin, vous trahissez vous-même votre propre ignorance, en faisant voir que vous ne savez rien ni de la nature de Dieu, ni de la nature de l’homme.

Dans l’exaltation de votre orgueil, vous poussez l’audace jusqu’à prétendre connaître les mystères ineffables de Dieu, tandis que nous voyons le Fils de Dieu lui-même, notre Seigneur, avouer qu’il n’y avait que le Père qui connût le jour et l’heure du jugement, lorsqu’il disait : « Quant à cette heure, personne ne la sait, pas même le Fils, si ce n’est le Père. » Puis donc que le Fils de Dieu n’a pas rougi de réserver à Dieu seul la connaissance du jour du jugement, comment nous-mêmes rougi-