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Page:George Eliot Adam Bede Tome 2 1861.djvu/22

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adam bede.

chaque côté de l’espace ouvert où les jeux sur l’herbe devaient avoir lieu. La maison n’aurait été qu’un simple manoir carré du temps de la reine Anne, sans les restes d’une antique abbaye qu’une de ses extrémités rejoignait et dominait. Ces beaux et anciens restes étaient un peu en arrière sous l’ombrage de vieux hêtres, mais le soleil donnait pour le moment sur les parties les plus hautes et avancées ; les volets étaient tous fermés, et la maison semblait dormir pendant la grande chaleur du jour. Cette vue rendit Hetty tout à fait triste ; Arthur devait être quelque part dans les salons, avec la haute société, où il ne pouvait point apprendre qu’elle était arrivée, et elle ne le verrait pas de bien, bien longtemps ! pas avant que le dîner fût terminé, moment où il viendrait, disait-on, pour faire un discours.

Mais Hetty se trompait dans une partie de ses conjectures. Il n’était point venu de grande compagnie, excepté les Irwine, auxquels on avait de bonne heure envoyé la voiture, et Arthur n’était point dans ce moment dans les chambres du fond, mais se promenait avec le Recteur dans les larges cloîtres de pierre de la vieille abbaye, où les longues tables étaient dressées pour tous les tenanciers et les domestiques des fermes. Arthur était ce jour-là un très-beau représentant de la Grande-Bretagne, très en train de gaieté et vêtu d’un frac bleu clair à la dernière mode, le bras délivré de son écharpe, l’air franc et candide aussi ; mais les gens candides ont leurs secrets, et les secrets ne laissent point de plis aux jeunes visages.

« Sur ma parole, dit-il en entrant dans la fraîcheur des cloîtres, je crois que les villageois sont les mieux partagés ; ces voûtes font une délicieuse salle à manger par une chaude journée. Vous avez eu une fameuse idée, Irwine, pour les dîners, de les organiser avec autant d’ordre et d’agrément que possible, et seulement pour les tenanciers, car je n’ai, après tout, qu’une somme limitée ; quoique mon grand-père