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Page:George Eliot Adam Bede Tome 2 1861.djvu/40

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adam bede.

mérite doit être reconnu. C’est un de ceux que l’on doit estimer et que ses amis doivent prendre plaisir à honorer. Je connais Adam Bede, je sais très-bien ce qu’il est comme ouvrier, et je sais ce qu’il a été comme fils et frère, et je dis la simple vérité en affirmant que je le respecte autant qu’aucun autre homme vivant. Je ne vous parle pas d’un étranger ; quelques-uns de vous êtes ses intimes amis, et je crois qu’il n’est personne ici qui ne le connaisse assez pour boire cordialement aussi à sa santé. »

Comme M. Irwine s’arrêtait, Arthur se leva d’un bond, et, remplissant son verre, s’écria : « Verre plein ! pour Adam Bede, et puisse-t-il vivre pour avoir des fils aussi fidèles et habiles que lui ! »

Personne, pas même Bartle Massey, ne fut aussi enchanté de ce toast que M. Poyser ; et quelque rude labeur qu’eût été son premier discours, il se serait levé pour en faire un autre, s’il n’avait pas compris l’extrême inconvenance d’un tel procédé. Dans ce cas, il donna cours à ses sentiments en buvant son ale avec une promptitude inusitée et en reposant son verre avec un beau mouvement du bras et un choc bruyant sur la table. Si Jonathan Burge et un petit nombre d’autres se sentirent moins satisfaits à cette occasion, ils firent de leur mieux pour paraître contents, et cette santé fut bue avec l’apparence d’un bon vouloir unanime.

Adam était plus pâle qu’à l’ordinaire quand il se leva pour remercier ses amis. Il était très-ému de ce témoignage public, ce qui était bien naturel, car il était en présence de tous ceux qui formaient son petit monde et tous s’unissaient pour lui rendre honneur. Mais il ne sentait aucune timidité à parler, n’étant point troublé par quelque petite vanité ou le manque de mots ; il ne paraissait ni gauche ni embarrassé, mais se tenait debout dans son attitude habituelle ferme et droite, la tête rejetée un peu en arrière et les mains parfaitement tranquilles, avec cette dignité mâle qui