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ESCAL-VIGOR

ces et plus abominables que celles des sordides boutiquiers.

Blandine, un peu défiante, avait accueilli cordialement ce commensal du château. Heureuse de la félicité que le jeune Govaertz procurait à Henry, elle lui faisait bon visage sans parvenir toutefois à lui témoigner beaucoup d’expansion. Au fond, sans éprouver une antipathie manifeste pour ce petit paysan, elle dut être parfois meurtrie en ses fibres, en ses atomes crochus, et, malgré son bon cœur, sa saine raison, sa grandeur d’âme, elle eut sans doute de fréquents mouvements de dépit contre ce commerce intellectuel si intime, cette étroite camaraderie, cette entente parfaite des deux hommes. Elle alla même jusqu’à jalouser le talent et le tempérament du jeune artiste, ces dons spirituels qui le rapprochaient plus de l’âme de Kehlmark que tout son amour à elle, simple femme, gardienne de son bonheur. La bonne créature ne montrait rien de ces moments, si humains, de faiblesse, que sa raison reprochait à son instinct.

Quant à Claudie, au début et même longtemps, elle ne fut aucunement offusquée de cette grande faveur témoignée par le Dykgrave au jeune Gui-