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ESCAL-VIGOR

— Il sait tout ! dit-elle.

Elle mentait à dessein pour parer toute attaque de la part de Landrillon. S’il parlait, le comte ne le croirait pas. La noble femme voulait que Kehlmark ignorât toujours jusqu’à quel point elle s’était sacrifiée pour son repos ; elle ne voulait point l’humilier, ou plutôt lui causer un éternel chagrin en lui prouvant combien elle l’avait aimé.

— Et malgré cela, il te reprend ! constata Landrillon. Pouah ! Vraiment vous êtes dignes l’un de l’autre… Ainsi tu l’aimes encore, ce décati, ce panné ?…

— Tu l’as dit. Et, si possible, plus que jamais…

— Tu m’appartiens. Je te veux, et sur-le-champ… Ne fût-ce qu’une dernière fois ?

— Plus jamais ; je suis libre et me ris désormais de toutes tes entreprises !


Landrillon fut tellement pris au dépourvu par cette volte-face et maté par l’air désespérément résolu des maîtres de l’Escal-Vigor, qu’au dehors il n’osa donner suite à sa conspiration et divulguer ce qu’il avait vu ou, tout au moins, parler de ce qu’il soupçonnait.