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Page:Georges Ista La Tomate 1909.djvu/4

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Le nez à une fente du décor, Marbrerot, en attendant sa réplique, suivait le jeu des deux femmes, un pli de dédain aux lèvres. La grosse Pauline jouait un rôle de mère aux pleurnichantes déclamations. Mais elle le jouait pour le quatrième fauteuil de la première rangée, pour lui seul. C’est à lui qu’elle déclarait, avec une œillade assassine, que son cœur était brisé… Et c’est à lui qu’elle demandait, avec son sourire le plus engageant : « Reste avec moi, ne nous quittons jamais. »

Heureusement, la réplique de Marbrerot arrivait. Sur ces mots de Pauline : « Non ! Non ! Je ne veux pas ! » il se mit à piétiner in crescendo, pour imiter un pas qui se rapproche, fit trois enjambées sur la scène, puis s’arrêta, fièrement campé, un poing sur la hanche. Et il prit un temps, un long temps, pour permettre au public de l’admirer tout à son aise, mais dont Rosemonde profita pour lui souffler tranquillement : « Donnez-moi la Tomate, m’sieur Marbrerot. »

Le colonel débutait par une tirade de cent cinquante vers, avec deux effets bien marqués. Hélas ! aucun ne porta, car le petit jeune homme qui voulait s’engager, planté derrière le colonel, accompagnait chaque vers de ce murmure obstiné : « Donnez-moi la Tomate, m’sieur… Donnez-la moi, siouplaît… »

Allez donc soulever l’enthousiasme