Page:Germain - Œuvres philosophiques, 1896.djvu/351

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de mieux en mieux éclairée, constate, il est vrai, qu’elle a seulement « toléré » les persécutions contre les protestants sans y prendre part. Est-ce assez vraiment ? et ses plaintes contre de telles violences n’ont-elles pas été trop « discrètes » ? L’extrême souci qu’elle a montré de ménager son précieux crédit, lui a enlevé l’estime complète et surtout l’affection de la postérité.

« Nous avons alors jeté les yeux sur une gloire plus modeste et pure de tout alliage ; sur une personne qui n’a vécu que pour l’honneur de son sexe, pour les conceptions les plus hautes de la science et de la philosophie, et dont la trop courte existence peut être proposée comme un modèle de toutes les vertus. Son nom, que l’avenir connaîtra mieux, appartient à l’histoire des progrès de l’esprit humain et peut être cité à côté de ceux des plus grands génies du dix-huitième siècle, les d’Alembert, les Diderot, les Condorcet, dont elle procède directement.

« Sophie Germain est née à Paris, en 1776, l’année même du renvoi de Turgot, d’ime famille d’orfèvres, tous artisans célèbres depuis près de deux siècles, et dont quelques-uns furent échevins de notre ancien Hôtel de Ville. Son père, député du Tiers aux États Généraux, puis membre de cette immortelle assemblée qui donna à la France sa première constitution, débute ainsi dans un de ses discours : « Je suis marchand, je demeure dans la rue Saint-Denis. Je viens combattre les banquiers et tous ces messieurs qu’on