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d’eau, de leurs procédés de construction, du nombre et de la grandeur de leurs ouvrages d’art. Pour cela, c’eût été peu de chose que de se contenter de la mise en ordre des résultats acquis. Malgré toute la foi que pouvaient mériter les recherches précédentes, il était bon de les contrôler par soi-même, de suivre l’une après l’autre toutes ces canalisations depuis leurs origines jusqu’à la ville, non pas seulement en promeneur curieux et en archéologue, mais un peu en ingénieur, en constructeur et en terrassier. Puisqu’il s’agissait, en effet, d’arriver à une connaissance rationnelle et solide de la façon dont ces travaux avaient été conçus et mis en œuvre, le plus pratique était de se supposer en quelque sorte à la place de ceux qui les avaient dirigés, d’examiner, comme ils avaient dû le faire, la topographie de la région, le régime de ses eaux, le débit moyen de ses rivières, d’aviser les systèmes de prises d’eau possibles, les tracés naturels, les pentes nécessaires, et d’estimer en conséquence les choix auxquels on s’était jadis arrêté. Dès lors, la reprise des vérifications avec la mire et le niveau n’était plus seulement une opération de contrôle machinal : elle servait à mieux expliquer les ouvrages eux-mêmes, à dire pourquoi ici tel contour, là tel passage en tunnel, plus loin telle brusque différence de cote, à soupçonner l’existence, puis à reconnaître l’authenticité d’un canal affluent, d’une prise d’eau accessoire, d’un bassin collecteur ; enfin à faire surgir, à renverser, ou à étayer des hypothèses. Ces recherches ne devaient pas se borner à l’étude des tracés et des profils, mais s’étendre à la construction, et par cela même au chantier et à sa disposition. La contexture extérieure et intérieure des maçonneries avait bien été indiquée déjà, mais en avait-on spécifié avec assez de précision et de justesse l’établissement et les phases d’élévation ? Quel rapport avaient ces constructions avec les nôtres dans les cas pareils ? Quelle était, soit d’une manière générale dans les constructions romaines, soit spécialement pour cette région et pour ce genre de travaux, la composition des ciments, mortiers et bétons ? N’était-ce pas une occasion de connaître un peu plus à fond l’art de bâtir des Romains, à la grande époque de leur domination florissante dans le pays que nous habitons ?

Fournir quelques notions de plus sur l’art de l’ingénieur romain, telle a donc été, au delà du but immédiat de ce travail, l’ambition qui a guidé sa préparation. À cet égard, les aqueducs de Lyon offrent de prime abord une particularité des plus intéressantes : la traversée de vallées profondes au moyen de conduites forcées ou siphons remplaçant des arcades dont l’établissement eût été trop coûteux ou même totalement impraticable. Ce procédé est aujourd’hui entré dans la pratique