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nord, la voie de l’Océan qui, par Autun, Reims et Amiens, aboutissait au port de Boulogne ; et à l’est, la route du Rhin qui, par la Bresse, gagnait Besançon et, de là, Bâle et la Germanie supérieure. Chacune de ces routes comporta d’importantes bifurcations.

Pour réaliser rapidement cette grande entreprise, nul doute qu’Agrippa n’ait employé ses soldats légionnaires. Il n’est pas du tout nécessaire pour cela de supposer aux portes de Lyon un camp immense et permanent, analogue au camp prétorien de la porte Colline, à Rome, ou à celui de Lambæsis, en Afrique. On s’est longtemps évertué à chercher les vestiges de ce camp aux alentours de la ville ; on s’y évertue encore[1]. Il faut se représenter les choses tout autrement. Lyon fut bien, en effet, un centre de mouvement pour les légions des Gaules, et les routes d’Agrippa avaient précisément pour premier but de favoriser cette circulation de troupes, qui devaient pouvoir affluer vers Lyon comme vers le cœur du pays. Mais ces troupes n’avaient pas à s’y accumuler. Elles y passaient seulement quand une guerre ou une insurrection les appelaient d’un point du territoire à un autre. Lyon ne fut donc jamais un quartier général, bien qu’il y demeurât toujours quelques corps de troupes en permanence. Ce fut même, avec Carthage, la seule ville de l’empire qui eut une véritable garnison. Une quatrième cohorte urbaine, supplément aux trois qui résidaient à Rome[2], fut créée spécialement, à ce que l’on croit, pour Lyon. Mais, sauf des cas exceptionnels, on n’y vit pas séjourner une légion entière.

Agrippa dut y amener un important effectif de l’armée avec laquelle il venait de soumettre les Cantabres[3]. Ces troupes furent aussitôt appliquées au tracé des routes, d’après les plans des ingénieurs militaires, et avec le concours des populations gauloises réquisitionnées à cet effet. Tandis qu’elles se disséminaient en un certain nombre de détachements ou d’équipes sur le parcours projeté de ces voies, il y a tout lieu de supposer qu’Agrippa

  1. Steyert (ouv. cité, p. 137) raconte la plaisante anecdote du prétendu camp romain découvert à Décines, petite localité voisine de Lyon ; ce camp romain était commandé, en 1843, par le duc de Nemours.
  2. Rappelons que les cohortes urbaines étaient numérotées à la suite des neuf cohortes prétoriennes, que la première par conséquent fut numérotée X ; la quatrième XIII.
  3. Dion, LIV, 11.