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LETTRE IV.


Ce 2 juillet 1788.
Au Camp devant Oczakow.


NOUS sommes arrives ici le même jour que le maréchal Munich, il y a 41 ans : et si l’on vouloit, comme lui, ne douter de rien, nous serions de même dans trois jours dans la place, quoiqu’elle soit tout à la fois à présent un camp retranché et une forteresse. Mais qu’y a-t-il de difficile pour des Russes ? Quel beau jour que celui de notre arrivée ! nous avons fait rentrer bien vite les Spahis qui étoient dehors, et nous avons tout reconnu. Un plus beau jour encore, c’est celui où j’étois comme l’ange de l’Apocalypse, un pied sur l’eau, pendant le combat naval, et l’autre sur terre. Pendant ce tems-là, la ville étoit en feu, et deux vaisseaux turcs sautoient en l’air. Quelle belle et affreuse illumination ! C’étoit un peu avant le jour. On n’a jamais vu une si magnifique horreur, un spectacle si imposant et si terrible. Nous en avons tous les jours de gais et qui ne sont heureusement pas si superbes : comme, par exemple, des escarmouches de Spahis, des chasses de Guirlanghis, etc.