Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/219

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de commandeur de l’ordre militaire de Marie-Thérèse. L’Empereur me l’a déjà envoyée. On dit qu’ils ont été contens de ma promptitude et surtout de l’effet de ma dernière batterie, qui a décide les Turcs à capituler. Il n’a manqué à mon bonheur que l’arrivée d’Abdy Bacha pour secourir la place. C’eût été un plaisir vit pour moi de passer la Save, de contribuer à battre le Bacha, et de revenir ensuite continuer mon attaque. Cet Abdy Bacha étant toute l’espérance de la garnison, si elle ne s’étoit pas rendue, j’avois pensé à une ruse un peu enfantine qui, malgré les plaisanteries qu’on en eût faites, comme des stratagèmes de Polyène et de Frontin, eût, je crois, bien réussi.

J’aurois voulu que le maréchal eût caché, pendant la nuit, quelques bataillons avec des canons dans une vallée, à une demi-lieue du camp ; qu’il eût fait sortir au point du jour de ses lignes, ou de celles d’Eugène (car ces deux noms se lient à présent à merveille) les troupes destinées à attaquer cet Abdy Bacha, s’il étoit venu pour nous faire lever le siège. On auroit fait un feu d’enfer toute la journée, de part et d’autre, sans boulets. On seroit revenu dans les lignes, avec de grands cris de joie, on auroit tiré de la tranchée, de l’armée et de mon corps un grand feu de réjouissance : et la place auroit capitulé.