Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/260

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En 1793.

De Belœil.


M a d a m e,


QUEL. beau nom que ce Caucase ? Que je suis aise que ma lettre y ait été faire un tour ? Mais voyez l’injustice du ciel : c’est là qu’il a puni un pauvre diable de Prométhée qui n’a pas fait pis que V. M. I., et il la fait triompher dans le lieu même de ce supplice. Un vautour déchiroit Prométhée, et vous déchirez les vautours qui vouloient manger les troupeaux de vos belles prairies sur les frontières de votre Empire.

Votre Majesté, plus coupable cent fois que ce voleur du feu céleste, se sert du feu de cent pièces de canon qui ébranlent tous ces petits trônes situés dans les creux de ces monts fameux ; à la bonne heure, puisque le ciel le veut ainsi, et qu’il est plus sage que le ciel d’alors.

J’ai bien besoin de m’occuper des jours brillans et fortunes de V. M., pour chasser les souvenirs qui me tourmentent sans cesse. Une malheureuse princesse que j’ai eu le bonheur et la facilité de voir continuellement pendant douze ans de suite, belle, bonne, et calomniée