Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/339

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n’en voulois que ce qu’il me falloit pour une espèce de passe-port ou billet d’entrée, et je lui dis que je croyois pourtant qu’il n’avoit pris ces deux genres d’occupation servile, que pour éteindre le feu de sa brûlante imagination. Helas ! me dit-il, les autres occupations que je me donnois pour m’instruire et instruire les autres, ne m’ont fait que trop de mal. Je lui dis après, la seule chose sur laquelle j’étois de son avis dans tous ses ouvrages, c’est que je croyois comme lui au danger de certaines connoissances historiques et littéraires, si l’on n’a pas un esprit sain pour les juger. Il quitta dans l’instant sa musique, sa pervenche et ses lunettes, entra dans des détails supérieurs peut-être à tout ce qu’il avoit écrit, et parcourut toutes les nuances de ses idées avec une justesse qu’il perdoit quelquefois dans la solitude, à force de méditer et d’écrire ; ensuite il s’écria plusieurs fois : Les hommes ! les hommes ! J’avois assez bien réussi pour oser déjà le contredire. Je lui dis : Ceux qui s’en plaignent sont des hommes aussi, et peuvent se tromper sur le compte des autres hommes. Cela lui fit faire un moment de réflexion. Je lui dis que j’étois bien de son avis encore sur la manière d’accorder et de recevoir des bienfaits, et sur le