Page:Germaine de Stael - Lettres et pensées du maréchal prince de Ligne, Paschoud, 1809.djvu/66

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plus de cérémonie ? Voyons, je vous le rendrai, Veux-tu bien me donner de cela, dit-elle au grand-écuyer ? — Oui, répondit-il, si tu veux me servir autre chose. — Il part de là pour un déluge de tutoiemens, à bras raccourcis, plus drôles les uns que les autres. Je mélois les miens de Majesté, et ta Majesté me paroissoit déjà assez. D’autres ne savoient ce qu’ils devoient dire, et la Majesté tutoyante et tutoyée avoit, malgré cela, toujours l’air de l’Autocratrice de toutes les Russies, et presque de toutes les parties du monde.

L’Impératrice nous a permis, au prince de Nassau et à moi, comme amateurs et peut-être connoisseurs, d’aller reconnoître Oczakof et dix vaisseaux Turcs qu’on est venu placer très-malhonnêtement au bout du Boristhène, comme pour arrêter notre navigation, en cas que LL. MM. II. voulussent aller par eau jusqu’à Kinburn. Quand l’Impératrice eut vu la position de cette flotte sur la petite carte qu’où lui présenta, Nassau lui offrit ses services pour l’en débarrasser. L’Impératrice donna une chiquenaude au papier, et se mit à sourire. Je regarde cela comme un joli avant-coureur d’une jolie guerre que nous aurons bientôt, j’espère. Je crus bien l’autre jour que c’étoit pour cela qu’on faisoit entrer dans le cabinet de l’Impéra-