Page:Gervaise de Latouche - Histoire de dom B… portier des chartreux, 1741.djvu/195

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
164
Histoire de Dom B…


reur, l’état où je l’avois laiſſée. Elle ſera morte, diſois-je triſtement, timide comme je la connois, il n’en falloit pas tant pour lui donner la mort. Elle n’eſt donc plus, continuois-je, accablé par cette refléxion cruelle ! Suzon n’eſt plus ! Ah, Ciel ! Mon cœur, que ces douloureuſes penſées avoient ſerré d’abord, s’ouvrit bien-tôt après à un torrent de larmes, & j’en verſois encore, quand je vis entrer Toinette qu’on avoit inſtruite de ma maladie. Sa vûë m’épouvanta : je tremblois qu’elle ne vint me confirmer un malheur dont je ne doutois plus, & je mourois d’envie de me l’entendre repéter de ſa bouche : il n’en fut pas queſtion, & ſon ſilence ſur ce ſujet joint à celui de tout le monde, me fit croire que ma douleur pouvoit être ſans fondement. J’en vins juſqu’à penſer que Suzon en avoit peut-être été quitte, comme moi, pour la frayeur.

Le chagrin que j’avois reſſenti de ſa mort, fit place à la curioſité de ſavoir ce qui s’étoit paſſé dans ſa chambre après mon depart ; mais c’étoit une curioſité que je ne pouvois ſatisfaire qu’après mon retabliſſement.

Les deux jours de repos que Madame Dinville m’avoit accordées, étoient