Page:Gervaise de Latouche - Le Portier des Chartreux, 1889.djvu/148

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de combat ; il fallait avoir de la sagesse pour ne pas se laisser aller ; je l’eus, cette sagesse ; je triomphai de mon envie. Il faut pourtant convenir que la réflexion eut bonne part dans ma modération. La dame Françoise pourrait à la fin s’impatienter de ce petit manège, des honnêtes remontrances passer aux cris, des cris, que sais-je ? sonner le tocsin sur nous, ou peut-être venir faire sentinelle à notre porte. S’exposer aux risques d’être arrêtés au passage ; mauvaise affaire ; rester dans la chambre, assiégés jusqu’au jour, au bout du compte il en aurait fallu sortir ; Comment ? Nus ; cela n’aurait pas été honnête, un jeune homme, une jeune fille dans cet équipage. Le parti le plus sûr était de faire une prompte retraite ; je la fis ; mais avant que de gagner mon lit je jugeai prudemment que je ne serais qu’un sot si je laissais subsister dans l’esprit de Nicole l’opinion trop avantageuse que j’y avais fait naître sur le compte de l’abbé. Il en aurait trop coûté à mon amour-propre de faire à ce maroufle le sacrifice de la gloire que je venais d’acquérir sous son nom. De la vanité, à moi, cela vous fait rire, lecteur, n’est-il pas vrai ? J’aurais voulu vous voir à ma place. Je vous suppose rival comme je l’étais et sensible au plaisir de vous venger, je gage que vous auriez été aussi fat que moi, et que vous auriez dit, ainsi que je le fis ; ma belle Nicole, vous ne devez pas être mécontente de moi ? Là-dessus elle vous aurait