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M. Pelet-Borsat, géomètre-arpenteur, était un modèle de père couveur. Chaque fois qu’il rentrait pour le repas de famille, il était assailli par la troupe de ses moutards : l’un lui tirant la basque de sa lévite marron, l’autre les bouts flottants de sa cravate olive ; tous criant, riant, piaillant, jusqu’à ce qu’il les eût installés autour de la grande table où fumait un immense plat de légumes quelconques.

Sa femme et la vieille Pierrette, leur bonne, ne pouvaient suffire à toute la besogne intérieure ; lui se chargeait de débarbouiller ses mioches, les habillant, les peignant et poussant la bonté paternelle jusqu’à leur faire avaler, cuillerée à cuillerée, la bouillie ou la panade de leur déjeuner.

Le dimanche, c’était un spectacle à peindre que celui de l’embarquement de toute la tribu Pelet-Borsat pour la promenade ou une partie de plaisir. Je crois qu’ils possédaient une propriété lilliputienne à Montagnole ou à Bellecombette, d’où ils tiraient une masse de provisions de ménage que le couple Borsat rapportait, le soir de chaque expédition, dans des cabas en tapisserie ou des sacs de nuit d’indienne.

Ceux-là, nous ne les fréquentions pas, un peu parce que les enfants trop mal élevés ne pouvaient être de bons compagnons pour moi, et aussi parce que je crois qu’il eût été difficile à la maîtresse de maison de trouver un instant pour recevoir des visiteurs.