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d’où l’on ne devait rien voir, ni le ciel, ni les fleurs, ni les oiseaux, rien, rien… que les vieux chats maigres sautant d’un toit à l’autre, et quelquefois la pluie ruisselant sur les ardoises grises. Je pensais à tout cela au milieu des grands prés que l’on fauchait, sous la tonnelle de chèvrefeuilles odorants, et le long des petits sentiers où j’allais cueillir les fraises sauvages si savoureuses. J’y pensais et j’en étais toute attristée.

Un jour ou deux après notre retour à la ville, au moment où nous achevions de dîner, on sonna. Josette alla ouvrir et revint bientôt, disant que la servante de la dame folle demandait à parler à grand’mère. On la fit entrer ; elle paraissait sombre et affligée.

— Est-ce que votre petite Nancy est malade, m’écrai-je, avant même qu’elle eût fait quatre pas dans la salle.

Bonne-maman m’imposa silence et pria la gouvernante de lui apprendre ce qu’elle désirait d’elle.

Celle-ci, un peu embarrassée, comme quelqu’un qui n’a pas l’habitude d’exprimer sa pensée, raconta que depuis le jour où j’avais parlé à la fillette de la fenêtre de ma chambre, tout était sens dessus dessous chez sa maîtresse. Nancy avait un tel désir de me revoir qu’elle en pleurait souvent ; de son côté, Madame Gaud, voyant l’enfant s’attrister ainsi, s’agitait, se tourmentait et… sa maladie s’augmentait tous les jours.

— C’est pour ça, Madame, que je suis venue