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Je fus emportée ; ils furent grossiers ; les coups étaient proches… Être seule de mon opinion et la soutenir quand même était une chose qui ne m’effrayait point. Je me rangeai contre la haie, faisant face à la troupe de mes adversaires, composée d’une petite fille, excellente et paisible mère de famille aujourd’hui, et de trois petits garçons qui on, je crois, très-pacifiquement fait, plus tard, leur chemin dans le monde. Garantie de toute traîtreuse attaque de leur part, je leur jetai fièrement ce mot comme un sanglant défi : — Malhonnêtes ! Ah ! dame ! cela devint chaud ! Les pierres s’en mêlèrent ; ils étaient quatre, j’étais seule ; l’inégalité était flagrante. Malgré mon courage, j’allais succomber… quand un renfort inespéré m’arriva. Sta, ma nouvelle amie, car je sentais que nous allions nous aimer, — fit un geste, poussa un cri, et, prompt comme l’éclair, son singe quitta sa mine béate, fit deux bonds, une cabriole, et se trouva droit comme un I devant la Bohémienne, prêt à exécuter ses ordres, avant que nous fussions revenus de notre ébahissement. Du doigt, Sta montra mes agresseurs, en faisant claquer sa langue contre son palais. Ah ! quelle déroute ! quelle reculade ! Je vous assure que j’en ris encore aux larmes en y pensant. L’animal, excité par la petite fille, courut sus aux bambins en montrant les dents d’une façon terrible, accompagnant cette grimace peu rassurante de la pantomime la plus expressive. S’armant de cailloux, de branchages desséchés et autres projectiles