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sous le grand mûrier ombrageant la cour, Sta me contant tout ce qu’elle avait vu, moi l’écoutant les yeux grands ouverts et la bouche béante, pendant que le singe, suspendu aux branches de l’arbre, se gorgeait de mûres déjà flétries !

C’est que c’était bien beau ce qu’elle savait et ce qu’elle avait vu, la zingarella ! La mer surtout, ce mot qui, tout petit qu’il est à l’oreille, me représentait une chose aussi vaste que tout ce que je pouvais imaginer !

Et les palais tout en marbre blanc, comme la cheminée de notre salon de Chambéry ! Et les églises si hautes, si hautes que l’on ne voyait plus les oiseaux qui se perchaient au sommet de leurs clochers… Les jardins tout plantés de roses, les bois où grandissaient des arbres portant des oranges, des citrons, des dattes, des figues, que j’avais toujours cru être nés tout uniment, chez les confiseurs… Que ce devait être admirable, ces chemins bordés de haies toujours fleuries, ces champs où croissaient pour tout le monde les fruits qu’ici l’on payait si cher !

Par exemple, un détail qui me refroidissait un peu, c’était que ce paradis terrestre était habité par d’affreuses petites bêtes que l’on trouvait partout : les zanzares (moustiques) qui vous empêchaient de dormir, les scorpions se collant aux murs et pénétrant jusque dans votre lit, les tarentules qui pouvaient faire mourir d’une piqûre ; puis quelquefois les sauterelles, arrivant tout à-coup