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mains, et répétait à satiété : « Oh ! contente moi ! contente moi !… »

Mon camarade, agacé sans doute par cette explosion d’un bonheur qu’il ne partageait que médiocrement, retrouva le premier sa langue :

— « Oh ! que ta maison est vilaine ! » dit-il en faisant une grimace de dégoût.

« Il fait trop chaud, et ça sent bien mauvais ici ! » ajoutai-je, enhardie par la franchise d’Alexandre.

La danseuse arrêta brusquement ses pirouettes, et, d’un air boudeur, murmura quelques mots dans son idiome incompréhensible.

C’était pourtant vrai, de reste, ce que nous avions dit, et je puis vous assurer que, malgré que je fusse encore bien jeune, je n’ai rien oublié de l’affreux tableau que j’ai eu sous les yeux. Ces impressions-là ne sauraient s’effacer de la mémoire.

La maison de Sta, comme la nommait mon ami, était une grande boîte en planches partagée dans le milieu par une cloison plus haute que moi, et percée de quatre trous étroits et carrés servant de fenêtres. Je ne pouvais voir que la partie dans laquelle on nous avait fait monter ; c’était probablement un des dortoirs de la tribu. L’autre compartiment devait être une cuisine, car on apercevait un morceau de tuyau de poêle qui trouait le plafond tout noirci par fumée. Pas la moindre trace de meubles dans le coin où nous étions ; seulement de larges banquettes, fixées à la paroi par de