Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 1.djvu/160

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
152
HISTOIRE DE LA DÉCADENCE

dons de la nature, et embellies par les arts. Onze d’entre elles se disputèrent l’honneur de dédier un temple à Tibère, et leur mérite respectif fut examiné dans le sénat de Rome[1]. Il y en eut quatre dont la proposition fut rejetée, parce qu’on ne les crut pas en état de fournir aux dépenses nécessaires pour une si grande entreprise. De ce nombre était Laodicée, dont la splendeur paraît encore dans ses ruines[2] : elle retirait des revenus immenses de la vente de ses moutons, renommés pour la finesse de leur laine ; et peu de temps avant la dispute dont nous venons de parler, un citoyen généreux lui avait laissé plus de 400 mille liv. sterl. par son testament[3]. Telle était la pauvreté de Laodicée : elle peut nous faire juger des richesses des villes qui avaient obtenu la préférence, et principalement de

  1. Tacite, Annal., IV, 55. J’ai pris quelque peine à consulter et à comparer les voyageurs modernes, pour connaître le sort de ces onze villes asiatiques. Sept ou huit sont entièrement détruites, Hypæpe, Tralles, Laodicée, Ilion, Halycarnasse, Milet, Éphèse, et nous pouvons ajouter Sardes. Des trois qui subsistent encore, Pergame est un village isolé, contenant deux ou trois mille habitans. Magnésie, sous le nom de Guzel-Hissar, est une ville assez considérable, et Smyrne est une grande ville peuplée de cent mille âmes ; mais à Smyrne, tandis que les Francs soutenaient le commerce, les Turcs ont ruiné les arts.
  2. Le Voyage de Chandler dans l’Asie mineure, p. 225, etc., contient une description agréable et fort exacte des ruines de Laodicée.
  3. Strabon, l. XII, p. 866 ; il avait étudié à Tralles.